1. Quel était votre rôle au sein des Forces armées canadiennes?
J’ai servi dans l’armée canadienne comme spécialiste des soins de santé pendant deux ans et ensuite comme spécialiste du renseignement pendant huit ans.
2. Pourquoi est-il important que les femmes servent côte à côte avec les hommes au combat et dans l’armée?
Les femmes ont servi au combat dans différents rôles à travers l’histoire. Ma grand-mère est née aux États-Unis et a renoncé à sa citoyenneté américaine lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté. Elle a déménagé au Canada pour se joindre à l’Armée canadienne et participer aux efforts de guerre. Même dans les pays où les femmes n’ont pas le droit de remplir des rôles liés au combat, elles ont servi au front en qualité de spécialistes du renseignement, des transmissions et des soins de santé, ou encore comme ingénieures et à différentes capacités. Le Canada peut être fier de ses Forces, qui emploient des femmes dans tous les domaines, y compris dans des rôles liés au combat.
Ce ne sont pas seulement les hommes qui expérimentent le phénomène de la guerre, et le résultat des guerres ne touche pas uniquement les hommes de nos sociétés. Aussi est-il important pour les femmes de s’engager. De plus, les environnements de combat sont complexes et ne constituent pas un vase clos; souvent les combats se passent dans les rues et impliquent bien plus que l’adversaire.
Il y a des choses qu’une femme soldat peut faire que les hommes trouveraient plus difficiles. Durant mon déploiement en Bosnie, j’ai souvent été utilisée comme intervieweuse pour des femmes qui ont souffert de violence fondée sur le sexe, car les victimes sont plus à l’aise de parler à une femme qu’à un homme à propos de leurs expériences. Il y a aussi d’autres exemples, comme le fait de parler à des femmes provenant de cultures où les hommes et les femmes vivent séparément. Une armée composée seulement d’hommes pourrait mettre en péril l’efficacité de nos opérations.
3. Comment avez-vous réussi à faire l’équilibre entre votre devoir envers votre pays et votre devoir de mère/fille/épouse/compagne?
Ma carrière dans les Forces armées canadiennes a été alimentée par mon désir d’aider à faire une différence dans la vie des personnes touchées par les catastrophes naturelles et celles causées par les hommes, alors je n’ai pas réfléchi à l’impact que cela aurait sur ma famille. Lorsque j’étais déployée à l’étranger, je savais que c’était difficile pour mes parents, mais je savais aussi qu’ils étaient fiers de ma contribution à l’aide apportée aux personnes que les conflits rendent vulnérables. Comme mère célibataire, c’est plus difficile d’atteindre l’équilibre travail-famille, comme dans toute carrière, mais mes enfants sont fiers de me voir servir.
4. Quelles sont les limites officielles des membres féminines des Forces, le cas échéant? OU quelles sont les principales idées préconçues sur les femmes militaires?
Je suis fière de dire que les Forces canadiennes n’imposent pas de limites aux femmes. Les femmes, tout comme les hommes, peuvent servir dans n’importe quel domaine ou rôle tant qu’elles respectent la norme minimale nécessaire pour accomplir ce travail. Dans mon instruction de base, dans les années 1990, la meilleure candidate du cours était une femme. Elle ne mesurait pas plus de cinq pieds et pouvait soulever des gars de plus de six pieds sur le terrain. La capacité d’une personne ne peut être fonction de son sexe, et je suis heureuse que les Forces canadiennes le reconnaissent.
5. En quoi, le cas échéant, l’armée a-t-elle changé depuis votre enrôlement?
L’importance de la santé mentale est davantage reconnue aujourd’hui, et cela va au-delà des Forces armées jusqu’à la société dans son ensemble. L’armée a toujours été un moteur en ce qui concerne les avancées techniques qui profitent au reste de la société – comme les innovations médicales – ainsi que les changements positifs dans les normes sociales. L’accroissement récent de la reconnaissance de l’importance de la santé mentale a été provoqué par l’accroissement des problèmes de santé mentale au sein de nos Forces.
En plus d’un dialogue beaucoup plus ouvert sur la santé mentale, les Forces canadiennes font des efforts pour sévir contre les inconduites sexuelles afin de rendre le milieu de travail plus sécuritaire pour tous les membres. Ce sont des efforts dans la bonne direction.
6. Comment votre identité féminine s’est-elle développée depuis que vous avez quitté les forces armées?
Quand je me suis enrôlée, on nous avait dit que nous n’étions pas des hommes et des femmes, mais que nous étions tous des soldats. Les gens s’identifient à différents aspects du spectre du genre – il y a peut-être des hommes qui s’identifient davantage aux rôles traditionnellement féminins et des femmes qui s’identifient davantage aux rôles traditionnellement masculins. Même si l’identité du soldat est plus masculine que féminine, on ne peut perdre notre identité féminine lorsque nous joignons l’armée, on prend l’identité du soldat ou du marin ou autre, quelque soit le corps auquel on appartient. Mon identité a évolué depuis que j’ai quitté l’armée, mais je ne pense pas que j’ai perdu ce qui fait de moi un soldat. Je pense que cela ne nous quitte jamais, et c’est quelque chose de positif.
7. Qu’est-ce que cela a signifié pour vous de concourir aux Jeux Invictus?
J’ai été emplie de fierté et d’humilité de représenter le Canada aux Jeux Invictus de 2016. Ce que j’ai aimé à propos de mon sport, le tir à l’arc, est que c’était le seul sport dans lequel les hommes et les femmes se disputaient la même médaille – il n’y avait pas de catégorie séparée. Et c’est quelque chose que j’ai aimé.
Les Jeux Invictus ont été très inspirants en ce qui a trait au soutien apporté à tous les concurrents par tous les concurrents. Même si les participants concourent les uns contre les autres, ils se soutiennent comme on ne l’a jamais vu dans d’autres événements sportifs ou même dans la société. Le personnel militaire voit parfois le pire de l’humanité; il voit les formes extrêmes de manifestation de la haine. Les Jeux Invictus offrent une occasion de voir ce qu’il y a de bon en l’humain.